Questions-réponses avec Eddy Savoie des Résidences Soleil : la gestion des affaires
« Dans les médias » Par Anthony Bonaparte, The Suburban – 7 mai 2025.
Né en novembre 1943 à Kedgwick, une minuscule communauté francophone du nord du Nouveau-Brunswick, Eddy Savoie déménage à Montréal à l’âge de 15 ans avec moins de 5 $ en poche et trouve du travail comme ouvrier. À l’âge de 28 ans, il est déjà un entrepreneur prospère travaillant sur de grands projets immobiliers. Puis, en 1988, à l’âge de 45 ans, Eddy Savoie créé la première résidence pour personnes aînées, Les Résidences Soleil, à Boucherville, au Québec. Aujourd’hui, le Groupe Savoie — une entreprise familiale qui regroupe son épouse, cinq enfants et plusieurs petits-enfants — possède et exploite 15 résidences dans toute la province, employant près de 2 000 personnes.
The Suburban s’est récemment entretenu avec Eddy Savoie, 81 ans, fondateur et président du conseil d’administration, et sa fille aînée Nataly Savoie, présidente exécutive, depuis leur siège social de Boucherville. La conversation a été traduite de l’original en français et éditée pour plus de clarté et de longueur.
The Suburban : Comment vos premières années au Nouveau-Brunswick vous ont-elles façonné ?
Eddy Savoie : Nous vivions près d’un petit village. Il n’y avait pas d’industrie, sauf principalement le bûcheronnage. Nos parents travaillaient généralement six mois par an pour un salaire dérisoire, si bien que lorsque les enfants atteignaient 15 ou 16 ans, la plupart d’entre eux partaient pour Toronto, Montréal ou les États-Unis afin de travailler et d’envoyer de l’argent. Nous étions huit enfants dans notre famille et quand j’ai eu 15 ans, c’était mon tour de partir.
The Suburban : Vous êtes rapidement devenu un constructeur prospère. Qu’est-ce qui vous a incité à ouvrir une résidence pour personnes aînées ?
Eddy Savoie : Mes parents sont venus vivre avec moi huit ou neuf ans après mon arrivée. À ce moment-là, je faisais de petits travaux de construction. Mon père a fini par perdre son autonomie. J’avais une femme et des enfants, alors nous avons commencé à chercher un endroit qui pourrait prendre soin de mes deux parents. J’en ai trouvé de belles, mais elles n’offraient pas tous les services nécessaires, comme une prise en charge 24 heures sur 24. Tout a donc commencé par une véritable histoire d’amour avec mes parents, car ils étaient très importants pour moi.
The Suburban : Comment avez-vous choisi le nom Les Résidences Soleil ?
Eddy Savoie : Quelqu’un a dit : « Pourquoi ne pas l’appeler Les Résidences Soleil parce que la plupart des gens veulent prendre leur retraite au soleil ? »
The Suburban : Cette première résidence était-elle un nouveau concept à l’époque ?
Eddy Savoie : Il n’y avait rien au Québec qui offrait tous les services, avec quelqu’un à la réception 24 heures sur 24. À partir de là, les gens se sont sentis en sécurité. Je voulais aussi qu’il y ait de la bonne nourriture et des services variés comme des tables de billard, une piscine, un sauna et même des baignoires à remous thérapeutiques. Je voulais que mes parents aient ce qu’ils avaient avec moi. Mais je voulais que ces services soient accessibles à tout le monde à un prix raisonnable.
The Suburban : Le Québec était-il le seul à ne pas offrir ces services ou existaient-ils ailleurs ?
Nataly Savoie : À la fin des années 1980, les résidences pour personnes âgées ressemblaient davantage à des pensions de famille ou à des immeubles d’habitation réservés aux personnes âgées. Mais le concept de résidences entièrement intégrées – avec tout ce qu’il faut pour que les personnes âgées vivent en toute sécurité, et avec tous ces services disponibles – n’existait pas. Heureusement, 40 ans plus tard, la situation s’est beaucoup améliorée. Ce ne sont plus des endroits où l’on va mourir, mais de grands Club Med pour les personnes d’un certain âge. Nous avons aussi pensé aux personnes qui ont peu de moyens financiers, donc nous avons voulu que les résidences soient le plus abordables possible.
Eddy Savoie : Mes parents n’avaient pas d’argent. Je comprends ce que c’est que de ne pas avoir d’argent. C’est pourquoi je voulais créer quelque chose qui soit accessible à tous les Québécois. Je savais ce que c’était que d’être pauvre.
The Suburban : Quels sont les défis aujourd’hui pour gérer ce type d’entreprise ?
Eddy Savoie : Offrir des services haut de gamme à un prix raisonnable et maintenir une structure de coûts acceptable pour tous. Nous sommes une entreprise familiale et nous ne commencerons pas un nouveau projet tant que toutes nos autres résidences ne se portent pas bien.
The Suburban : Quelles sont les réalisations dont vous êtes le plus fier en tant que PDG ?
Eddy Savoie : Ma famille. Toute ma famille. L’entreprise peut construire de belles résidences, mais voir ma famille évoluer au sein de l’organisation – mes enfants et mes petits-enfants – c’est ce qui est important. Si l’on veut que les entreprises québécoises restent au Québec, il faut créer le cadre nécessaire pour les diriger à partir d’ici. Et quand cela se fait en famille, c’est très satisfaisant.
The Suburban : La vente n’est donc pas une option ?
Eddy Savoie : Absolument pas ! Des investisseurs japonais, australiens, américains et chinois sont venus frapper à notre porte. Mais si nous les intéressons, c’est que nous faisons quelque chose de bien – et nous en sommes très fiers !
